Écrire, c'est se dévoiler ; une mise à nu de l'âme

J'ai reçu des dessins empreints d'une grande sincérité de la part d'un lecteur, qui, dans son message d'accompagnement, a révélé toute l'émotion que lui a procurée la lecture d’Une certaine éducation. Cela m'a donné l'envie de partager avec vous ma propre vision de l'écrivain qui, à travers ses mots, se livre entièrement.

Écrire, c'est se dévoiler : une mise à nu de l'âme

L'écrivain n'a pas d'échappatoire, il est lié à son époque, qui est à la fois sa chance et son fardeau. Son rôle est d'embrasser cette réalité avec lucidité, car il en est le reflet. Chaque mot qu'il écrit, chaque silence qu'il garde, résonne. Comme le disait Brice Parain, les mots sont des « pistolets chargés » : parler, c'est tirer. Choisir de s'exprimer, c'est faire feu, et cela demande de viser avec précision, de ne pas laisser ses mots éclater au hasard, comme un enfant qui jouerait avec des détonations sans but.

Écrire, c'est dévoiler le monde, mais aussi, et peut-être surtout, dévoiler l'homme. L'écrivain, en mettant à nu ses pensées, expose aux autres une partie de lui-même. À travers ses mots, c’est son intimité qu’il offre au lecteur, sans artifices ou, parfois, avec des artifices bien choisis. Cette mise à nu est réciproque : en lisant, le lecteur se découvre lui-même. Dans ce face-à-face, l’écrivain et le lecteur s’observent mutuellement, chacun révélant une part de son être.

L'écriture est ainsi comparable à un effleurage : chaque phrase, chaque mot, caresse ou heurte, et dévoile, doucement ou avec rudesse, une part cachée de l'auteur. Écrire, c'est se déshabiller, non seulement pour révéler une pensée, mais pour inviter le lecteur à regarder au-delà du texte, vers la nature profonde de l'être humain.

L'écrivain a donc une mission : il ne peut ignorer le monde qui l'entoure, ni prétendre qu'il n'en est pas responsable. Comme il s’est engagé dans l’univers du langage, il ne peut plus se détourner de la vérité qu’il met en lumière. Les mots, une fois lâchés, s’organisent en phrases, et chaque phrase contient une vision du monde. Même le silence a un sens : se taire, c’est encore parler. Comme la pause en musique, il ne peut être compris qu’en relation avec les sons qui l’encadrent.

Ainsi, écrire, c’est oser se dévoiler, mais avec élégance et sensibilité. C’est offrir une part de son intimité tout en gardant une certaine pudeur. Lentement, avec soin, l’écrivain effleure des vérités profondes, dévoile sciemment ce qu’il porte en lui, et invite le lecteur à faire de même.

Pour illustrer mon propos, voici une œuvre de Damys. Illustration reçu en cadeau accompagné de ce message « Je n'ai pas le talent d'écrire ce que votre roman m'a permis de ressentir et de comprendre, alors pour vous remercier je vous dessine tel que je vous vois ».

L’illustration, dont l'idée de mise à nu est centrale, tant sur le plan physique que métaphorique est une vision fantasmagorique de l’écrivain qui par ses mots interpelle au-delà du raisonnable. La palette de styles, entre réalisme et abstraction, laisse entrevoir différentes facettes de la vulnérabilité de l'auteur. Le corps presque dénudé, exposé, est un symbole de vérité brute, où le regard, la posture, semble interroger l'observateur sur l'essence même de ce qu'il perçoit.

Il y a dans ce dessin une juxtaposition entre l’humain et l'idéalisation artistique, où la peau, par moments, se mêle à l'imaginaire de l’artiste. J’interprète ce cadeau artistique comme le voyage de l’auteur à travers son propre univers intérieur, vu à travers les yeux de ce jeune illustrateur. Le choix des couleurs, des lignes, et même de la pose, trahit (peut-être) l’admiration du lecteur, qui semble également offrir son propre ressenti, sa vision personnelle de ce que représente l’auteur pour lui.

C’est une création touchante, où l'artiste met en scène son interprétation du texte, traduisant par le visuel ce que les mots ne peuvent entièrement capturer.

Un merci sincère et réfléchi pour cette interprétation subtile et ce travail minutieux, un hommage à l’implication de l’illustrateur qui, par son art, semble dialoguer avec l’essence même de l’auteur et de son œuvre.